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Comment se portent vos finances?

18 janvier 2021/Marc-Antoine L'Allier

Condoliaison-Vol. 21 no 4

Finances d’une copropriété

Syndicats de copropriétaires et COVID-19

Comment se portent vos finances?

Par François G. Cellier

Est-ce que la copropriété divise subit les contrecoups financiers que peut entraîner la COVID-19? Dans certains cas oui, dans d’autres non. La réalité des immeubles varie selon plusieurs facteurs, dont le statut d’emploi des copropriétaires qui y vivent, leur capacité de payer et la santé financière des copropriétés elles-mêmes.

Celles dont le fonds de prévoyance est insuffisant, et où les frais de condo ont été sous-financés année après année pourraient moins bien s’en sortir. En revanche, les syndicats de copropriétaires qui gèrent adéquatement leur immeuble, en respectant la loi et leurs obligations, disposent d’un coussin confortable et peuvent mieux voir venir les coups.

Les retardataires

« Ce qu’on voit souvent, actuellement, ce sont des copropriétés qui ont tardé à ajuster leur frais de condo à l’étude du fonds de prévoyance, que nous leur avons convaincus de produire il y a quelques années. Maintenant qu’elles voudraient entamer un rattrapage financier en cette matière, il leur faut composer avec le coronavirus (COVID-19). Cela créé un climat tendu pour plusieurs syndicats de copropriétaires que nous gérons », lance Marc-Antoine L’Allier, directeur général de Lamarque Gestion Immobilière.

Les administrateurs doivent établir les sommes à investir dans le fonds de prévoyance, annuellement, en vertu d’obligations légales. Mais plusieurs copropriétaires leur imposent une pression énorme, afin que ces montants soient revus à la baisse, du moins pour quelques années à venir. « Bien que le phénomène soit circonscrit à quelques copropriétés seulement, les pétitions et les lettres ouvertes circulent. On observe également des réactions hostiles à l’égard d’administrateurs qui augmentent les frais de condo », observe Marc-Antoine L’Allier. Il en résulte un climat d’affrontement entre les copropriétaires mieux et moins bien nantis.

Les moins fortunés sont ciblés

Dans certains immeubles, des messages hargneux ont été affichés ça et là. Sur l’un d’entre eux, ont pouvait lire : « que ceux qui n’ont pas les moyens de vivre dans notre immeuble déménagent ». Parmi les personnes visées, il s’en trouve qui, d’emblée, n’avaient pas le pouvoir d’achat nécessaire pour accéder à la propriété. Et voilà que la COVID-19 est venue en rajouter une couche, ce qui fait d’autant plus mal à ceux qui touchent la Prestation canadienne d’urgence (PCU).

Malgré tout, seulement quelques copropriétaires ont demandé un report des paiements de leurs frais de condo. « Ce qui a été accordé dans tous les cas », précise Marc-Antoine L’Allier. D’autres ne reconnaissent pas les hausses imposées et continuent de payer le montant d’avant, ou l’ajustent selon leurs moyens financiers. Comme la pandémie est loin d’être terminée, les prochains mois risquent d’être déterminants. On verra, dès lors, si la capacité de payer d’une majorité de copropriétaires est toujours au rendez-vous. Il se pourrait que certains virements bancaires ou chèques postdatés ne passent plus.

Congé de frais de condo

Cela dit, d’autres copropriétés, dont les quelque 3 700 portes gérées par Gestactif ont opté pour une politique (à trois niveaux) axée sur la « flexibilité ». Cette politique est ajustée au niveau de tolérance propre à chaque syndicat desservi. Le premier niveau stipule que la perception pleine et entière des frais de condo demeure. Le second permet la prise d’un arrangement visant des paiements minimaux, conditionnel à ce que les copropriétaires concernés puissent faire la preuve d’une perte de revenus. Quant au troisième, il permet un congé de paiement pour une période indéterminée.

Cela dit, seulement huit personnes se sont prévalues d’un arrangement financier. « Nous sommes surpris d’un si petit nombre. Mais peut-être qu’avec la fin des reports de paiements hypothécaires, un plus grand nombre d’individus se manifesteront au cours des prochains mois, d’autant plus qu’il y aura reprise des cotisations spéciales (appels de charges) », fait savoir Dominique Poulin, fondateur de Gestactif.

Cotisations spéciales reportées

Il faut savoir qu’en raison de nombreux travaux qui ont été reportés, ces cotisations spéciales avaient été mises sur la glace. Mais depuis quelques semaines, les appels de charges ont recommencé dans certaines copropriétés dont la gestion est assurée par Gestactif. Et pour quelques-unes d’entre elles, le montant sera substantiel.    

Autre question : est-ce que les gestionnaires sont davantage sollicités, en raison de la COVID-19, afin de préserver les états financiers des copropriétés qu’ils gèrent? « Je dirais plutôt que cette pandémie a créé d’autres types d’irritants et de problèmes à gérer. Il faut notamment faire face à des conflits entre copropriétaires et administrateurs, mais aussi composer avec les retards pris dans l’industrie de la construction, qui sont allés jusqu’à un an dans plusieurs cas », souligne Marc-Antoine L’Allier. Il y a également eu plusieurs effets pervers liés aux tests de COVID-19, ainsi qu’à des mises en quarantaine.

Pour tout dire, la santé financière d’une majorité de copropriétés ne semble pas trop affectée jusqu’à présent, mais il ne faudrait pas que la crise sanitaire s’éternise, car les retombées négatives pourraient croître au cours des prochains mois. Il n’est pas exclu d’imaginer que si la deuxième vague se prolonge au-delà des prévisions, la copropriété risque d’en subir des contrecoups majeurs. Un tel scénario n’est pas souhaitable, car il en va de l’intérêt d’un segment de marché résidentiel majeur au Québec, mais aussi de la quiétude de milliers de copropriétaires éprouvés depuis trop longtemps déjà.